Bonjour Laura,

Alors que j'avais 26 ans, j'ai perdu l'amour de ma vie, mon amie, ma complice, mon idole, celle à laquelle je désirais ressembler plus que tout.... ma mère....

Elle est également décédée d'un cancer. Elle avait 46 ans et depuis quelques mois, je suis maintenant plus âgée qu'elle...

Ce fut un cancer fulgurant qui dura à peine 6 mois, mais en fait, ça s'est résumé à 2 semaines.... Je me souviens encore que la veille, alors qu'elle était aux soins intensifs, elle était allée à la salle de bain et une infirmière m'a demandé si elle et moi parlions de la mort (j'étais là depuis 2 semaines avec elle et ne la quittais que vers 04h pour aller prendre une douche et revenir auprès d'elle). Quand l'infirmière m'a posé cette question, en dedans de moi la réponse fut :"Ben voyons, m'a mère en a connu des bien plus durs et s'en est toujours sortie". Alors même la veille, je ne croyais pas la perdre...

Quand je l'ai "perdue", j'ai tout perdu et me suis perdue moi-même durant de longues années...

Même au bout de 20 ans, je ne sais trop parfois comment je me sens face à cette perte par contre, ce que je sais, c'est que la mort existe et oui, il m'arrive d'en parler avec Héritier. C'était plus facile lorsqu'il était petit. Il a aujourd'hui 17 ans et il est conscient lui aussi que la mort existe seulement, sa crainte de me perdre un jour est pour l'heure plus forte que tout ce que je pourrais en dire.

Douce journée à toi Laura,

Vous me donnez des frissons les filles...

C'est tellement pas facile la mort, la mort d'un proche, la mort de celui ou celle qu'on connaît depuis toujours, c'est immortel des parents!

J'étais plus vieille que vous deux quand maman est partie (cancer fulgurant elle aussi), c'était le 24 novembre 1993, elle avait 53 ans et moi 34. La douleur de cette perte... encore aujourd'hui j'essaie de ne pas y penser trop en profondeur car elle revient très facilement. Les premiers mois ma seule pensée était d'aller la rejoindre, je ne voyais pas comment je pourrais vivre sans maman.

On s'habitue à l'absence mais je pense encore à elle tous les jours, j'ai ses cendres chez moi et lorsque je vais toute croche, comme ces deux dernières années, j'ai l'illusion qu'elle est encore là et je lui parle... je m'installe à genoux devant ses cendres et sa photo et je lui demande de m'aider, de m'aider à être forte parce que je suis si fatiguée dans ma tête. Est-ce qu'elle m'aide? Je n'en sais rien mais je sais que maintenant je fonctionne bien, qu'on a trouvé un remède à ma sensibilité, alors peut-être qu'elle m'a aidée, j'ai envie d'y croire.

Lorsqu'elle est décédée fiston avait 12 ans. Maman avait assisté à sa naissance et c'était son premier petit-enfant en plus, donc un lien très spécial s'était créé entre eux. Il n'a pas voulu aller la voir à l'hôpital, c'était correct avec moi, du haut de ses 5'11" elle devait peser à peine 100 livres, elle faisait peur à voir et je préférais qu'il en garde une belle image. Il n'est pas venu à l'enterrement non plus et la semaine suivante il a fait une crise de larmes à l'école mais n'a jamais vraiment voulu en discuter.

Aujourd'hui j'ai presque l'âge que maman avait, j'ai peur, le cancer est héréditaire dans notre famille et ils meurent tous au début de la cinquantaine. Fiston (Jean-François) est adulte maintenant et j'essaie de temps à autre de lui rappeler que sa mère n'est pas éternelle, qu'elle vieillit même si elle est un p'tit peu flyée mais il ne veut pas en parler, pour lui je vais vivre très vieille.

Alors tu vois Laura, je crois que tout dépend des enfants, de leur caractère, de leurs besoins... toi tu aurais aimé qu'on t'explique alors que mon grand a toujours préféré s'éloigner de ces choses-là.

Gros câlins les filles xxxx

Gros calins à vous 2 aussi
Je comprends ton point Dyne ... C'est vrai que ce ne sont pas tous les enfants qui veulent vraiment savoir. Je dis les enfants, mais les adultes aussi préfère parfois ...ne pas saouère !

Ce qui me frustre dans mon cas, ce qui m'attriste, ce qui fait que je mouille encore mon oreiller la nuit ... C'est que jamais il ne m'aura vu grandir, jamais il ne m'aura vu parer ma robe de bal, ou ira me reconduire à mon mariage ( si un jour je me marie ) ....

Même chose si j'ai des enfants ....

Alors j'essaie de profiter un max des moments que je passe avec ma maman
Merci de vous êtes ouverte les filles xxx

Laura je ne suis pas sûre qu'il ne t'a pas vu grandir et qu'il ne te verra pas vieillir, te marier, avoir des enfants, etc. etc. J'aime croire qu'ils sont quelque part à nous regarder aller et nous aider si vraiment nécessaire. Un jour je raconterai le rêve que j'avais fait de ma mère et qui m'a sauvé la vie.

Tu fais bien d'être proche de ta maman, tu vois, tu as appris quelque chose de cette triste période de ta vie, que tu dois prendre soin des gens que tu aimes sinon tu t'en voudras à tout jamais. Mais ne t'en veux pas pour ton père, tu n'es coupable de rien, une ado est une ado et ne comprend et ne réalise pas toujours tout (oui oui, c'est bien moi l'anti-ado qui dit ça ).

xxx

Bonjour Laura,

Oh! Je comprends ce que tu ressens lorsque tu soulignes que tu aurais désiré que ton père puisse vivre avec toi les grands moments de ta vie...
Quand j'ai eu fiston, viande que j'aurais voulu que ma mère soit là. Viande que j'aimerais qu'elle soit là aujourd'hui. J'aurais tellement, mais tellement voulu qu'elle connaisse l'être merveilleux en devenir qu'il est... Ouffff....

Je ne sais pas s'il existe un "après-mort", mais je le souhaite profondément juste parce que j'espère qu'elle le connait.
Lui, il la connait énormément. Depuis toujours je la lui raconte alors même si elle n'est pas là, il a grandi avec elle...

Douce fin de journée

Vos histoire me touchent beaucoup.
À l'âge de 13 ans j'ai perdu ma meilleure amie, juste en face de l'école. Elle s'est fait heurter. Ça été un drame d'adolescence...Mes repères, ma confiance en la vie ont été très ébranlé.

Et cette année, en voyage au Vénézuela j'ai failli perdre ma meilleure amie actuelle. Elle est tombé dans le coma et selon les médecins c'était une question heure qui la séparait de la mort. Méningite hyper agressive. Et en revenant, j'ai appris qu'une autre très bonne amie à moi allait devoir se battre contre son deuxième cancer.

J'ai eu peur pendant longtemps de perdre ma mère par overdose (ancienne Junkie)...

Ma vie a complètement changé depuis janvier. La prise de conscience de la fragilité de la vie a été brusque, mais m'a ouvert les yeux d'une façon particulière.

J'ai peur de perdre les gens que j'aime encore, mais je sais que je dois profiter à fond de chaque instant que j'ai avec les gens que j'aime.

Alors quand je vous entends dire de profiter de chaque instant, je ne peux que vous dire : OUI vous avez raison. Merci de nous le rapeller.

Wow, vos partages me touchent grandement.

J'ai également perdu mon père suite à une longue maladie. J'avais 22 ans. Il n'en avait que 61. Il souffrait cependant d'Alzheimer depuis plusieurs années. À la fin, c'est le cancer des bronches et des poumons qui l'ont emporté.

Laura, je comprends ce que c'est que de subir les propos incohérents de son père... Avant de perdre l'usage de la parole et la mémoire, il m'en a dit des sottises! Je me suis battue avec ça en le reprenant jusqu'à ce que je comprenne que j'étais mieux d'embarquer dans ses histoires ou ses retours dans le passé et de profiter du fait qu'il me parlait! Plus ça avançait, il avait tellement le regard vide et était totalement absent, que lorsqu'il me lâchait une couple de sacres, j'étais heureuse car j'avais une réaction de sa part!

Mon frère refusait de venir le visiter à l'hôpital, ma mère et mon père étaient séparés, et toute la famille de mon père était en Gaspésie.... je me suis sentie bien seule à vivre cette maladie et les derniers moments qui m'effrayaient tant! J'avais peur de la mort. J'ai l'impression d'avoir mal accompagné mon père... la preuve, il a attendu que je ne sois pas là pour se laisser partir.

Et comme on ne parle pas des "vraies affaires" dans ma famille, on préfère faire semblant que des émotions, ça n'existe pas... Je suis retournée à ma vie quotidienne sans évacuer et vivre mon deuil comme il faut. Ça m'a rattrapée 1 an plus tard lorsqu'un banal événement m'a propulsée dans une profonde tristesse où j'avais l'impression que seul mon père aurait pu m'aider ou me réconforter!

Alors oui, je vous en prie, parlez des "vraies affaires" avec vos enfants. Malgré que je n'aie pas appris, je tâche de le faire avec mon fils de 8 ans. Je ne me cache plus pour pleurer devant lui, pour nommer ce qui m'habite, et je l'encourage à mettre des mots sur les sentiments et émotions qu'il vit lui aussi. On se pratique ensemble!

Profitons de chaque instant pour échanger avec ceux qu'on aime.

Citation :

J'ai l'impression d'avoir mal accompagné mon père... la preuve, il a attendu que je ne sois pas là pour se laisser partir.

Chrissy j'ai une façon de voir ça. Peut-être qu'elle t'aidera à avoir une autre impression.

Voilà, je voulais rester avec maman jusqu'à son dernier souffle, c'était important pour moi d'être avec elle jusqu'à la fin. Mais ma mère me connaissait, elle savait que j'étais hypersensible et que j'aurais bien de la misère à vivre avec cette image. Je n'y étais pas quand elle est partie mais ma soeur y était. Ça fait presque 18 ans qu'elle est morte et ma petite soeur fait de l'insomnie depuis ce jour, rien à faire l'imagine lui est restée dans la tête et selon ce qu'elle m'a raconté, c'était pas beau, calme et serein sa mort. Depuis je comprends pourquoi maman a attendu que je n'y sois pas pour partir, elle m'a protégée.

Peut-être que ton père a fait la même chose?

Ma mère a eu environ 24 heures pour "se revirer de bord". Ça semble fou de dire ça, mais quand t'as un cancer depuis six mois, qu'il semble être en bonne voie de guérison, que tu n'as que 46 ans puis que tout à coup "paf" ça s'écroule comme ça sans que tu ne t'y attendes....

J'étais auprès d'elle lorsqu'est venu le temps. Que de désolation dans son regard d'être obligée de nous quitter mon frère et moi... Ouffff!!!! Je vis avec ce regard. Fou à dire, mais malgré le fait que je conserve ce regard de peine en mémoire très clairement même si ça fait 20 ans pour moi et que ça m'attriste, il nous appartient à elle et à moi. Difficile à expliquer ...
Chose certaine, je suis profondément convaincue qu'il valait mieux que mon frère ne soit pas avec nous à ce moment-là...


Mon père est décédé quelque huit ans plus tard (j'avais donc 34 ans). Lui aussi a subi un cancer, mais à longue échéance. En fait, ça a duré 4 ans. Il a été en phase terminale, chez lui, les 6 derniers mois. Tous les jours durant ce 6 mois, je faisais ma journée de boulot, me rendais chez lui (environ 40 minutes de route) pour l'aider avec ses trucs de gavage puis me dépêchais d'aller chercher mon bébé et m'en occuper (pas de conjoint).

J'ai vu mon père la veille de son départ....*soupir....C'était la Fête des pères. Il était tellement mal en point que j'ai voulu l'amener à l'hosto. (pour lui, il n'a jamais été question d'aller mourir là). Il n'a rien voulu savoir et m'a forcée à retourner chez moi....Le lendemain, inquiète, je lui ai téléphoné - pas de réponse. J'ai téléphoné l'infirmier du clsc qui allait le voir tous les jours - pas de réponse. J'ai téléphoné l'hosto (me disant qu'il s'y était peut-être bien finalement rendu. Je ne sais plus à combien de personnes j'ai pu parler puis c'est son médecin qui est venu à l'appareil et m'a dit qu'il avait une mauvaise nouvelle...."ok, mon père est entré à l'hôpital?"
- Non, il s'est suicidé. Il faut que tu viennes à l'hôpital pour l'identifier officiellement. Tu passeras également au poste de police qui a la lettre qu'il t'a écrite....

Deux décès différents, mais oh combien tout aussi ravageur l'un que l'autre...

Viande! J'en reviens pas d'avoir écrit tout ça....Mais je le laisse....

Citation :

Tu vois, nous on a "tué" notre mère.

Et nous voulions faire la même chose. Je nous revois dehors tous les cinq en train de chercher un moyen de la faire partir sans qu'on soit accusés de meurtre. C'est terrible quand on y pense mais c'est tout aussi terrible de les voir souffrir inutilement. Finalement elle avait demandé à être débranchée de la machine qui lui évitait les caillots de sang et elle en est morte mais nous l'aurions fait, on l'aimait trop pour la laisser dans cet état.

Oups, mauvais choix de smiley, toutes mes excuses

pause-café a écrit:

Vraiment, je suis très émue de vos témoignages, de la direction que prend aussi le sujet. Merci pour ce beau moment... on ne se connaît pas, et pourtant c'est presque facile d'en discuter et d'approfondir... on ressent dans quel respect tout cela est fait

Idem Pause-café.

Perso., si je me suis ouverte ainsi c'est parce que définitivement, je me sentais bien de le faire... Vraiment très, très, très agréable de nous lire l'une après l'autre.

Ouaip! Gros merci Laura... Quel beau forum...

C'est très beau à lire. Ça me rapelle pourquoi j'aime tant les forum de discussion. Les échange qui s'y font sont à l'image des gens qui y sont. On semble avoir une belle gang en ce moment. Souhaitons que cette esprit de camaraderie, de respect et de soutien soit majoritairement présent !

pause-café a écrit:

Rouquinexx, en fait, ça ne dépend que de nous... moi je vote "pour" !

Je seconde 2 X plutôt qu'une...

Citation :

Ouaip! Gros merci Laura... Quel beau forum...

Idem. Et fait incroyable, j'ai presque pas été sur RC aujourd'hui .